Le projet de loi 61 « ouvre la porte aux malversations »

Écrit par sur 9 juin 2020

Le comité public de suivi des recommandations de la commission Charbonneau alerte le gouvernement de façon virulente s’il va de l’avant avec son projet de loi de relance économique tel qu’il est écrit.

Dans son mémoire qu’il présentera mardi à 21 h 45 en commission parlementaire, dont nous avons obtenu copie par une voie non officielle, le comité explique que le projet de loi 61 crée des conditions extrêmement favorables à l’émergence de corruption, de collusion et autres malversations apparentées.

Les quatre membres* du comité à l’origine du mémoire se sont penchés sur les dispositions de la pièce législative qui touche à l’octroi des contrats publics. L’article 50 permettrait de déroger à la Loi sur les contrats des organismes publics par simple règlement ainsi qu’à différentes conditions d’appels d’offres dans le monde municipal.

C’est donc l’ensemble de la normativité qui encadre l’octroi et la gestion des contrats publics qui pourrait être mise de côté par une intervention gouvernementale non soumise au contrôle parlementaire.

N’avons-nous rien appris de la commission Charbonneau?

S’il était adopté dans sa forme actuelle, cet article irait à l’encontre de toutes bonnes pratiques de saine gestion des marchés publics. Les leçons de la commission Charbonneau sur l’industrie de la construction laisseraient “,”text”:”peu de doute sur les dérives potentielles du projet de loi”}}” lang=”fr”>peu de doute sur les dérives potentielles du projet de loi, en raison de :

  • la multitude de projets pouvant pousser des concurrents à maintenir les prix élevés;
  • l’urgence et le pouvoir politique qui rend l’État plus vulnérable;
  • la trop grande rapidité des projets menant à moins de soumissionnaires potentiels.

Un tel cadre réglementaire serait aussi « contraire à certaines recommandations de l’OCDE ».

Le rapport de la commission Charbonneau, rappelle le comité, recommande de dépolitiser le processus d’octroi des contrats publics .

Le pouvoir exorbitant attribué au gouvernement […] est non seulement contraire à la suprématie parlementaire, mais également à celui de la primauté du droit.

Sur une note plus conciliante, les experts indiquent que les interférences du politique sur l’administratif n’ont pas besoin d’être mal intentionnées pour conduire à des opportunités de malversation dont pourraient s’emparer d’autres parties malveillantes.

François Legault n’est pas inquiet

Moi, honnêtement, ça ne m’inquiète pas la corruption, a déclaré mardi matin le premier ministre en réponse aux questions d’un journaliste sur les inquiétudes exprimées en commission parlementaire par les partis d’opposition au cours des derniers jours. Il a rappelé que son équipe ministérielle comprend l’ex-procureure en chef de la commission Charbonneau, Sonia LeBel, et que le parrain du projet de loi, le président du Conseil du Trésor Christian Dubé, est un comptable agréé.

Il y a même du monde qui ont milité à la CAQ parce qu’ils étaient tannés de la corruption dans d’autres partis. Donc, c’est sûr qu’on va mettre en place les mesures nécessaires pour ne pas qu’il y en ait, de corruption

M. Legault a appelé une fois de plus les oppositions à s’entendre avec son gouvernement pour adopter rapidement ce projet de loi destiné « réduire les délais » dans la réalisation des projets d’infrastructures et non pas de « réduire des exigences ». Il a évoqué la possibilité, si nécessaire, de prolonger la session parlementaire, qui doit normalement se terminer vendredi.

*Les membres du Comité public de suivi des recommandations de la commission Charbonneau sont Luc Bégin, professeur à l’Université Laval, Pierre-Olivier Brodeur, ancien recherchiste à la Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats, Denis Saint-Martin, professeur à l’Université de Montréal, et Marine Valois, professeure à l’Université de Montréal.

Mathieu Dion est correspondant parlementaire à Québec


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