Départs volontaires et temps partiel, exclus de la Prestation canadienne d’urgence
Écrit par Radio Centre-Ville sur 26 mars 2020
Vous avez décidé de quitter votre emploi en raison du bouleversement actuel? Vous n’aurez peut-être pas droit à la Prestation canadienne d’urgence, croit José Bazin, membre du Mouvement action-chômage de Montréal.
M. Bazin et ses collègues ont passé en revue la mesure annoncée mercredi par le gouvernement fédéral, dans le cadre du projet de loi C-13, pour venir en aide aux personnes qui ont perdu leur emploi ou leurs revenus à cause de la crise du coronavirus.
Premier constat du groupe de défense des sans-emploi : il s’agit d’une mesure « vraiment intéressante », qui permet au plus grand nombre de toucher la prestation. Et les femmes qui reviennent d’un congé maternité (Régime québécois d’assurance parentale) et qui perdent leur emploi vont elles aussi y avoir droit.
Une très bonne nouvelle, selon le groupe.
Le gouvernement a bien fait les choses cette fois-ci
, estime José Bazin. Il n’y a pas trop de « flaflas », explique l’expert, qui connaît les règles de l’assurance-emploi sur le bout des doigts.
Par exemple, en assurance-chômage, les exceptions sont légion. Oui, tu as le droit; oui, mais oui, mais, mais, mais. Tandis que dans le projet de loi, c’est quand même simple.
Pas de prestations en cas de départ volontaire
Mais il y a une « grosse faille », observe José Bazin. Si on en croit le projet de loi, les travailleurs qui ont quitté d’eux-mêmes leur emploi n’auront pas accès à la fameuse prestation.
Il faut voir ce que précisera « le règlement à venir », mais le projet de loi présenté mercredi est clair à ce sujet, poursuit l’expert.
Si je décide par moi-même de quitter mon emploi, parce que j’ai peur […] et que l’employeur n’a pas mis sur le relevé d’emploi ‘’Maladie’’, je vais être exclu des prestations canadiennes d’urgence, analyse-t-il. C’est nommément écrit dans le projet de loi.
Et sur le site de Service Canada, il est d’ailleurs bel et bien dit aux employeurs d’indiquer Départ volontaire
ou Congé
sur le relevé d’emploi, lorsque l’employé refuse de se présenter au travail alors qu’il n’est ni malade ni en quarantaine
, ajoute José Bazin.
L’autre problème, selon le Mouvement action-chômage, c’est que les travailleurs n’ont aucun recours si on leur refuse la Prestation canadienne d’urgence. Pour le moment, il n’y a rien d’inscrit en ce sens dans le projet de loi.
Qui est admissible à la Prestation canadienne d’urgence?
Tous les Canadiens qui ne peuvent plus travailler à cause de la COVID-19, qu’ils soient admissibles ou non à l’assurance‑emploi.
Cela inclut :
- Les personnes qui ont perdu leur emploi;
- Celles qui tombent malades;
- Celles qui sont mises en quarantaine;
- Celles qui prennent soin d’une personne atteinte la COVID-19;
- Les parents qui doivent rester à la maison pour s’occuper d’enfants malades ou à cause de la fermeture des écoles et garderies.
Salariés, travailleurs contractuels, travailleurs autonomes et étudiants sont admissibles à la prestation, pourvu qu’ils aient eu des revenus d’au moins 5000 $ dans les 52 semaines précédant la perte d’emploi ou dans l’année fiscale 2019 (pour les travailleurs autonomes par exemple).
Les demandes de prestation d’assurance-emploi qui n’ont pas été traitées en date du 15 mars 2020 seront automatiquement transférées à la Prestation canadienne d’urgence.
Sources : le MAC de Montréal et le ministère canadien des Finances (Nouvelle fenêtre)
Travailler à temps partiel ou toucher la prestation?
Pour toucher la Prestation canadienne d’urgence, les travailleurs doivent démontrer qu’ils n’ont touché aucun revenu pendant 14 jours consécutifs, fait remarquer Marianne Plamondon, avocate spécialisée en droit du travail chez Langlois.
Donc, ceux qui ont maintenu des revenus, même minimaux, vont être exclus
, poursuit l’avocate.
Ça va peut-être avoir comme impact que les employeurs vont préférer mettre à pied de façon temporaire, pour que les gens puissent se qualifier [à la Prestation canadienne d’urgence], plutôt que de garder un employé à temps partiel.
Et bien des employés vont préférer toucher la prestation parce qu’ils ne sont pas capables de travailler à l’heure actuelle, souligne Me Plamondon.
Beaucoup d’entre eux ont leurs enfants à la maison, et ils n’arrivent pas à travailler à distance, comme le voudrait leur patron.
Veut veut pas, il y a beaucoup de discussions entre employeur et employé à savoir si l’employé est capable ou pas de faire son travail », note-t-elle. « Bien que tu n’es pas supposé avoir quitté ton emploi de façon volontaire [pour toucher les prestations], on s’entend qu’il y a beaucoup d’employés qui lèvent la main pis qui disent : ‘’Moi j’aimerais ça être dans ceux qui sont mis à pied’’.
Cela dit, Me Plamondon applaudit le fait que les règles d’admissibilité pour la Prestation canadienne d’urgence sont beaucoup plus souples que pour l’assurance-emploi. Globalement, c’est quand même très bien. Même les étudiants sont couverts. C’est quand même une bonne façon d’aider les gens.
L’avocate souligne que cette mesure va encourager les gens à rester à la maison.
Il fallait qu’ils fassent quelque chose pour rassurer les gens, qu’ils puissent rester à la maison, et qu’ils ne soient pas là à essayer de se trouver de la job n’importe où, parce qu’ils n’arrivent pas.
Restez chez vous, et vous allez avoir l’argent nécessaire pour payer vos produits de base nécessaires! Si c’était ça l’objectif, je crois qu’il est atteint. Comme société, c’est ça qu’on voulait, que les gens restent chez eux
, conclut l’avocate.